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Comment rajeunir les tissus musculo-squelettiques ?

Jean-Marc Lemaître, Directeur de recherche Inserm, directeur de l’équipe Inserm « Plasticité génomique et vieillissement » Institut de Médecine Régénérative et Biothérapies, Montpellier, répond à 3 questions sur le sujet.

En 2011, votre équipe avait réussi à rajeunir des cellules de personnes centenaires, c’était de la reprogrammation épigénétique. Quel en est le principe ?

Nos cellules n’échappent pas au vieillissement. Celui-ci se caractérise par une modification
progressive du profil d’expression des gènes liée à l’apparition de marques épi génétiques. La conséquence est une perte progressive des capacités cellulaires, comme la résistance au stress ou la capacité de réparation. Nous sommes partis du principe que la différenciation cellulaire était réversible par reprogrammation nous appuyant sur les travaux des équipes de J. Gurdon et de S. Yamanaka : nous avons développé un cocktail de 6 facteurs géniques susceptibles de reprogrammer le destin d’une cellule vieillissante en celui d’une cellule souche pluripotente embryonnaire ; celle-ci présente une physiologie rajeunie, ayant effacé les marques épigénétiques du vieillissement.

Quelles sont les objectifs de vos travaux sur le vieillissement ?

Convaincu que la perte des différentes fonctions de l’organisme avec l’âge est avant tout une conséquence du vieillissement cellulaire et de sa susceptibilité accrue à entrer en sénescence, mon équipe cherche à mieux comprendre comment s’établit le vieillissement cellulaire et quels sont les mécanismes épigénétiques impliqués. L’objectif est de trouver des stratégies capables de retarder ou reprogrammer l’état sénescent afin d’en rendre les effets négligeables.

Peut-on espérer un traitement basé sur la régénération des tissus musculosquelettiques endommagés ?

Puisque le vieillissement cellulaire est réversible, rien ne s’y oppose… En effet, la reprogrammation permet de manipuler le destin des cellules pour les transformer en cellules souches pluripotentes induites (iPSC) issues du patient, même s’il est âgé. Ces iPSC peuvent être aujourd’hui redifférenciées en cellules musculaires mais aussi en cellules souches mésenchymateuses et hématopoïétiques à la physiologie rajeunie, et qui sont à l’origine du tissu musculo-squelettique. Ces cellules souches issues du patient, si elles sont greffées, permettent de s’affranchir des problèmes immunologiques du rejet. Elles représentent donc un formidable espoir qui nécessite le développement d’essais cliniques pour être concrétisé.

Working in the laboratory

 

Philippe Georgel, Directeur de l’équipe « Immuno-Rhumatologie Moléculaire » de l’unité 1109, Inserm, Université et CHU de Strasbourg répond à 3 questions sur le sujet.

Quel est le rôle des microARNs ?

Les microARNs sont des petits ARNs non codants de 20 à 22 nucléotides. Ils constituent des éléments de régulation post-transcriptionnelle majeurs : en se fixant sur des séquences cibles des ARN messagers (ARNm), ils provoquent leur dégradation ou inhibent leur traduction.
On estime que l’expression de plus de 60% des gènes est régulée par des miARNs.

Quelles sont les objectifs de vos travaux sur le vieillissement ?

Les miARNs sont des acteurs importants dans la régulation des processus inflammatoires. En effet, la réponse inflammatoire ne doit être que transitoire pour jouer un rôle bénéfique, sinon elle peut provoquer des dommages cellulaires. Leur rôle dans la polyarthrite rhumatoïde est attesté par de nombreux articles décrivant des altérations de l’expression de plusieurs miARNs chez les patients. Nos propres travaux ont conduit à l’identification de miR-346, miR-19 et miR-20 en tant que régulateurs négatifs de l’inflammation. Par ailleurs, une baisse globale de l’expression des miARNs dans les synoviocytes semble être une caractéristique des patients souffrant de PR.

Pourraient-ils constituer une piste de traitement ?

A ce jour, la modulation de l’activité de miARNs à des fins thérapeutiques n’est envisagée que dans le
cadre de l’infection par le virus de l’hépatite C (HCV). Jusqu’à présent, dans le cadre de la PR comme dans celui d’autres pathologies dans lesquelles des miARNs sont impliqués (cancers), les miARNs sont plutôt considérés comme des biomarqueurs dont le dosage dans le sang pourrait permettre de prédire la maladie, d’en affiner le diagnostic, ou bien de mieux définir et ajuster l’approche thérapeutique qui est envisagée.

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